mercredi 16 juin 2010

La mère aux commissaires : « Qu'est-ce que ça vous prend comme préjudice grave ? »

Le conseil des commissaires de la Commission scolaire des Sommets (CSS) s'est réuni hier à Magog. Il a de nouveau refusé des demandes d'exemption du cours d'éthique et culture religieuse (ECR) au cours de son assemblée de ce mardi 15 juin 2010.

Trois familles du territoire de la CSS avaient demandé une exemption pour leurs enfants. Dans chacun des cas portés à l'attention des commissaires, la majorité d'entre eux a jugé que les parents n'avaient pas fait la preuve que des « préjudices graves et personnels » avaient été causés.

Notons tout d'abord que l'article 222 de la Loi sur l'instruction publique (LIP) ne parle nullement de devoir prouver qu'un préjudice grave a été causé, mais qu'on en craint un et qu'on cherche à l'éviter  :
Pour des raisons humanitaires ou pour éviter un préjudice grave à un élève, la commission scolaire peut, sur demande motivée des parents d'un élève, d'un élève majeur ou d'un directeur d'école, l'exempter de l'application d'une disposition du régime pédagogique.
Présente à l'assemblée d'hier, une des mères concernées par ces décisions, Brigitte Meunier, a affirmé qu'elle considérait « absurde » la réponse obtenue compte tenu de la situation vécue avec son seul enfant inscrit au cours d'éthique et de culture religieuse.

Depuis son cours ECR, il refuse désormais d'aller à l'Église

« Je ne sais pas ce que ça prend pour qu'il juge que des préjudices sont causés. Mon enfant est rebellé en ce moment », a-t-elle déclaré à La Tribune après qu'elle eut quitté la salle.

En effet, le fils de Mme Meunier refuse catégoriquement de venir à l'église et de parler ou de voir les personnes de l'église qu'il connaît depuis qu'il est petit, en plus de se mettre à désobéir de différentes autres façons. Depuis quand ? Depuis qu'il a fait un projet en ECR sur le thème « les parents peuvent-ils obliger leurs enfants à aller à la messe » ! Voir la mise en contexte de ce projet !
Extraits de l'intervention de Madame Meunier

Nous avons trois enfants. Nous voyons ce que ce cours apporte de négatif dans notre vie à la maison. Notre fils aîné suit présentement ce cours en secondaire IV. Dans un travail pendant ce cours, il avait à se mettre dans la peau d’un avocat qui travaille en droit familial. Il doit défendre un jeune de 13 ans qui se demande si ses parents ont le droit de le forcer à assister à la messe.

Depuis qu’il a fait ce travail, il refuse de venir à l’église avec nous et ne veut plus voir les gens qui viennent à l’église. Maintenant, il nous dit que nous sommes de mauvais parents parce que c’est à cause de la religion que nous lui interdisons des choses aussi banales que de limiter le temps qu'il surfe sur Internet par exemple. C’est très difficile de le voir agir comme ça avec nous. Pourtant, d’autres parents pourraient établir les mêmes règles et ce serait correct parce qu’ils ne vont à aucune église ! Mais le pire dans tout cela c’est qu’il ne croit plus en Dieu et ne veut plus rien savoir de Dieu. Ils traitent les croyants d’hypocrites. Nous avons perdu le privilège de pouvoir parler avec notre enfant, car il s’est fermé à nous. Si nous ne pouvons pas forcer notre enfant à venir avec nous à l’église pourquoi avez-vous le droit de le forcer à suivre ce cours ?

Notre fille qui était en secondaire II l’an passé a dû de s’inventer un dieu en classe d'ECR. Elle n’a pas fait cet exercice. Il n’y a plus de morale quand tout devient correct selon ce que chaque personne pense.
« Dialogue » verrouillé

Outre les quelque vingt-cinq commissaires et observateurs de la CSS, près de 45 personnes se trouvaient dans la salle. Après les témoignages des parents qui demandaient l'exemption, l'assistance a eu le droit de poser des questions à ces mêmes parents, la seule occasion où il leur était permis de parler. Personne ne voulait poser de questions à ces parents éprouvés. Plusieurs témoins ont également dit connaître ces parents et ont déclaré n'avoir rien à demander à ces gens dont ils partageaient les inquiétudes, ils attendaient le déroulement de la séanece pour voir ce qui allait se passer et alors poser des questions. Pour un des jeunes hommes témoins des délibérations, le moment avait était choisi « par les commissaires-en-chef de façon à ce que notre droit de parole ne puisse pas être exploité pour défendre les parents. »

Les commissaires se sont bien gardés de permettre aux membres du public de s'adresser directement à eux, les commissaires, et de leur poser des questions ou de leur apporter d'autres témoignages. Quand un des commissaires favorables aux parents a voulu parler à ce moment, le président du conseil lui a demandé de s'abstenir de commentaires, la parole étant au public et les commissaires étant tenus à la neutralité !

Par la suite, tout au long de la soirée, à chaque fois qu'une personne a voulu intervenir, elle s'est vu demander de se taire, car elle n'était pas inscrite au préalable sur le rôle ! À plusieurs reprises, le président du conseil a cependant répété que l'assistance avait eu, à un moment donné, un droit de parole...

Réunion expéditive : il faut respecter la nature obligatoire du cours

Après ces témoignages, les « commissaires en chef » ont décidé de tenir une réunion à huis clos. Toute l'assistance a été obligée de sortir pendant une quinzaine de minutes. Le journaliste de la Tribune présent sur place nous a confié qu'il n'avait jamais vu une réunion de la CSS se dérouler de manière aussi expéditive et les commissaires être autant sur la défensive.

Avant de procéder au vote, un des commissaires a avoué qu'il était très favorable au cours ÉCR jusqu'à la fin de la semaine passée. Mais qu'au moment où il voulait se rendre à une messe à l'occasion du premier anniversaire du décès de sa grand-mère avec toute sa famille, sa fille (une adolescente qui aime bien le cours) a refusé de se joindre à eux, reniant les valeurs que sa famille lui avaient transmises. Refus maintenu même devant la peine de l'époux de la défunte, le grand-père encore vivant. Cela n'empêchera pas ce commissaire de voter contre l'exemption, pour des raisons « légalistes » comme nous l'expliquerons ci-dessous.

Ensuite vint le vote : dix (10) commissaires ont décidé que les parents n'avaient pas su les convaincre qu'il y avait dans leur cas un préjudice grave personnalisé, cinq (5) pensaient le contraire. Plusieurs commissaires tentèrent de justifier leur décision en s'en remettant au gouvernement, le gouvernement leur dictant leur conduite selon eux. C'est ainsi qu'un des commissaires a déclaré que plusieurs d'entre eux, à la lumière des témoignages d'un certain nombre de parents et de professeurs, n'étaient pas à l'aise face à ce cours mais, malgré ce fait, ils ne pouvaient pas légitimement voter contre l'imposition du cours ÉCR alors que celui-ci faisait partie des matières obligatoires du régime pédagogique... À quoi sert le droit d'exemption alors ?

L'auditoire était outré.

Proposition rejetée

Afin de résoudre le problème que représentent pour la commission les demandes d'exemption du cours d'ECR, un commissaire de la CSS, Stéphane Fillion, a fait une proposition lors de la réunion. Elle a été rejetée par dix commissaires contre six.

M. Fillion proposait qu'on permette d'exempter les enfants cette année dont les parents s'engageraient à obtenir l'avis d'un professionnel sur les préjudices que subiraient les enfants à cause du cours d'ECR.

Une autre commissaire, Réjeanne Miliot, a déclaré qu'il était trop tôt pour approfondir le débat entourant le cours. « Je veux qu'on attende la décision de la Cour suprême » a-t-elle soutenu. Il y aurait donc incertitude, mais même avec ce doute il ne lui est pas apparu sage d'être prudente et de balancer du côté de la prévention d'un préjudice potentiel.






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1 commentaire:

Romanus a dit…

On nage en plein Kafka! Et ca n'inquiète personne!